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Exercices d'embuscades à Mouillepied

Attribution des munitions par le service des Poudres & Salpêtres :

4 Gargousses, 28 Grenades, 73 Cartouches.


Consommations : Suivant le rapport du Service des Poudres & Salpêtres.

Canon : 4 tirs. Grenades : 28. Pistolets : 7 cartouches brûlées. Pierre ou Silex : 0.



Exercices d'embuscades dans la forêt de Mouillepied

Excercice d'embuscade dans les bois de Mouillepied





Le Sergent Tire-Bourre, le Second-Maître Le Gênois et l'Appointé Caporal Mieux Vaut Tard narrent leur vie à travers leur journal de marche :


A l’attention de l’Ingénieur Constructeur

Commandant le détachement du 8ème B.O.M.M/44ème Équipage de Flottille.

Rapport du Sergent « Tire-Bourre »

Chef de la 1ère Batterie, 1ère Compagnie du 3ème Régiment d’Artillerie de Marine

Mission du 4 et 5 août de l’an 18, Sise le château de Mouillepied, relais des 3 chevaux en Charente Inférieure.

En ce jour du 6 Août de l’an 18

Samedi 4 août


4h00 : « Vérole qu’est-ce qui faut pas faire pour des chevaux ! Me v’la à partir de la caserne avant l’aube pour leur éviter l’coup d’chaud sur le caillou et surtout… not’ Cambusier. Enfin ! J’arrive sur place et bon Diou y a personne, pas d’camp ! L’est pas possible d’voir ça ! Faut que j’enquête, mais dans un premier temps j’m’en va déjà planquer mes bêtes dans l’bois, parce qu’il y aura pas toujours des cochons volontaires pour leur sauver la piot. »


6h30 : Après une courte recherche, j’questionne le tenancier d’l’Auberge des 3 chevaux, près du château, qui m’dit qu’à partir d’aujourd’hui c’est plus qu’ l’Auberge du cheval chanceux et qu’le bataillon est là-bas, à la lisère de la forêt, juste à côté de l’enclos ou jusqu’à la veille au soir, il y avait encore 3 biaux destriers. Décidément c’n’est pas une armada qu’on aurait du envoyer contre l’Nelson mais la Garouille lui-même et ses crocs d’requin ! Moi j’vous l’dit aussi sec ! S’aurait été une boucherie, pis qu’avec des piranhas d’chez les Papous (Papous papa à poux, bien sûr !). J’veux m’présenter alors à la sentinelle de not’ camp, manque de bol rien…personne ! Y a du avoir du grabuge, mais n’écoutant qu’mon courage légendaire, j’avance prudemment, est là, juste devant moi, se dresse la dure et terrible réalité d’not condition humaine. Des cadavres par milliers, bon peut-être pas autant, mais disons quelques dizaines au sol et sur les tables. Il y a là des troupes ennemies, toutes identiques, du même moule quoi, avec la même étiquette sur le ventre, portant le nom d’un obscur General Prusso-Alsacien Von Kantrerbrau. Ah ! Que la bataille a du être belle, mais bon ! Point d’traces des troupes françaises. Cré-vingt-Diou que j’me dis ! Voila t’y pas qu’aux premières lueurs pâles de l’aube, au milieu d’une prairie, j’vois ce que j’pourrai appeler techniquement un machin couché avec un bidule sur un trépied. J’m’approche doucement et oh, stupeur ! C’est l’second maître Le Génois qui s’prend pour Galilée. (A rester comme ça, étendu sur le sol, y finira froid comme l’univers). Bon, tant pis ! A mon emplacement, j’mets d’l’eau à chauffer et monte ma tente. L’ingénieur sort d’sa tente-bureau où il a sans doute travaillé toute la nuit (Ou presque !). Il grommelle, comme toujours, des choses à propos d’La Garouille, des ch’vaux disparus et des dédommagements pour l’aubergiste, etc. « Sergent Tire Bourre à vos ordres Mon Commandant ! » Il sursaute, m’observe, se remet d’ses émotions et me r’connaît. Il esquisse son drôle de rictus qui fait froid dans l’dos et dit « Ah, c’est vous, tout de même ! Il est où mon café ? ». Puis il m’donne les consignes du jour, et s’replonge dans ses pensées profondes, les mains croisées dans ses basques. J’installe mes avant-trains, fais mettre les pièces en batterie à l’emplacement prévu et détermine mon périmètre de sécurité.


9h00 : Confection de « grenades » à main, et préparatifs pour les exercices d’abordage avec lancé de grappins, de grenades à main, de couteaux, de haches, de piques d’abordages, de faux cils et de rognures d’ongles, suivi d’un cours d’escrime à la cuillère à pot, le tout sous le haut patronage du lieut’nant d’vaisseau La Grenade et moi-même dit Tire Bourre. Puis nettoyage des armes.

Attribution de munitions

12h00 : C’est l’heure d’la popote avec c’te fois d’la bonne viande blanche. Ouf ! L’a donc point trouvé mes chevaux l’cambusier.


15h15 : Départ pour un exercice de reconnaissance d’un bois inconnu. Le détachement d’matelots de débarquement d’la flottille, sortes de voltigeurs marins, si j’puis dire, va r’connaître le sentier et passe en mode « iroquoise », c'est-à-dire en silence sur la pointe des godasses ou plutôt des mocassins. Mais hélas, le détachement est suivi à courte distance d’apprentis conscrits dits « enfants d’troupe », bavards comme des pigeons, dont les gloussements et les cris d’coyotes affolés détonnent un peu dans le vert paysage. Si l’ennemi est là, y sont tous foutus que j’me dis ! L’Second Maître, rouge de colère a même songé à tirer sur ces oiseaux là, mais le Lieut’ l’en a dissuadé, c’est la relève ces mômes !


17h00 : Autre exercice d’abordage avec, encore une fois, lancés de grenades à main pour les gabiers-grenadiers et aides-canonniers. Auparavant not’ commandant décide de faire une démonstration qui lui rappelle, dit-il, un combat dans l’océan indien avec Surcouf. On doute un peu, l’est menteur comme un fonctionnaire, car la grenade a explosé, certes ! Mais bien loin d’l’objectif prévu, c'est-à-dire aux pieds des gars derrière lui, 12 morts ! Son cri d’guerre : « A l’abo’dage ! Hourrrra ! » Rappelle celui du Lord-quartier-maître Lapérouse, muté disciplinairement dans l’port de La Flotte en Ré pour avoir détruit une partie de la flottille d’Oléron en juin dernier. Bref ! Nous, on n’dit rien, on rigole en dedans ! C’est l’Chef, y pourrait s’vexer !


19h30 : La cloche de la cambuse résonne : Déplacement en colonne, gamelles en main, sous la surveillance des sous officiers et officiers qui seront servis les derniers.




Dimanche 5 août


6h30 : Réveil et petit déjeuner. L’cambusier a tué une vache par erreur, qu’il dit ! On doute, mais on a plus d’lait pour le café !


9h15 : Exercices d’abordage et tirs au pistolet. Le second-maître Le Génois, le canonnier Le Brutal, L’aide fourrier Requiem, l’aide canonnier Sans-Quartier, l’ouvrier Main-Gauche, le caporal ouvrier Le Trusquin, et L’apprenti ouvrier Le Cadet font l’coup de feu. Aucun perte dans les rangs, c’te fois !


10h00 : Départ d’une nouvelle patrouille de r’connaissance en forêt. Peu de temps avant cette expédition, j’ai mission d’foutre les chocottes aux matelots en piégeant les sentiers en compagnie du Cadet et du Brutal. Accessoirement j’dois trouver des champignons habillés d’un joli rouge et plein de p’tiots points blancs, destinés à préparer une sorte de « bouillon de onze heures » pour La Garouille, histoire de lui faire oublier l’goût du canasson.


10h15 : Nous localisons des bruits suspects et des silhouettes inconnues dans notre zone à champignons. Ne disposant que d’un reliquat d’grenades nous passons à l’attaque en espérant l’arrivée immédiate de la patrouille. Nous mettons en application la technique dite « de la 7éme compagnie », c'est-à-dire la fameuse « Tenaille ». Le brutal et son chef (moi-même) rabattons ces malandrins sur Le Cadet, bien camouflé dans les fourrés, qui les achève à la grenade. Les champignons sont sauvés, mais l’cambusier, pas sûr !


11h00 : Après une guérilla intensif et une défense exemplaire de ma compagnie d’artillerie, les paltoquets fuient devant l’arrivée de la patrouille qui bizarrement est couverte de … farine, auraient-ils contrôlé une chariote de meunier ? En tous cas impossible d’en savoir plus. Il semblerait, je n’sais pas pourquoi, qu’ils ne veulent plus m’adresser la parole. Même le Génois semble plus froid qu’la veille au soir.

12h00 : La cloche de la cambuse résonne : Déplacement en colonne, gamelle en main, sous la surveillance des sous officiers et officiers qui seront servis les derniers. Comme d’habitude !


14h30 : Une nouvelle mission nous attend, il faut partir vers d’autres aventures. Les couleurs sont amenées, puis on démonte le camp.


15h00 : Attèlement du train d’artillerie avec MES chevaux. Désabusé de ne point les avoir trouvés, La Garouille s’approche de l’attelage qui trésaille d’effroi en sa présence. Ca sent tout les bêtes ! Son reste de mégot d’maïs au bec, v’la ty pas qui m’propose de débaptiser mes destriers et de les nommer : Lasagne, pour le premier, Hachis-d’Canasson pour le second et Sponghéro pour le troisième. Insultant, que j’dis, en mettant la main sur la poignée d’mon sabre. Sur ce, il détale aussi sec. Faudra tout de même vérifier le contenu d’ses bocaux d’rillette, faîtes après le camp de Vergeroux.




Veuillez trouver ici, Mon Commandant, la fin du rapport

Sergent Fred, dit « Tire Bourre »

 

Rapport du Second-Maître Timonier « Le Génois »

44ème Équipage de Flottille.

Vendredi 3 août

17h00 : Après un long chemin depuis la ville de Pau, sur mon fidèle destrier blanc (Non, je rigole, c’est pas un cheval, mais une draisine, sorte de cheval de bois avec une selle et deux roues sans pédale, qu’on appellera vélo dans 100 ans !). Véhicule que j’ai volé sur le port, près d’une gabarre sur le Gave. J’ai tellement mal au fondement que j’marche les jambes arquées comme un Peau rouge, ou plutôt un marin que j’suis. En vérité, j’ai raté la malle-poste qui devait m’amener au port de Rochefort par la grand’route. A peine arrivé près du Château d’Mouillepied, belle bâtisse sur les rives du fleuve Charente, j’entends d’la terrasse d’une auberge, des paysans du coin « jacqueter » à propos de canassons disparus. Ca m’rappelle ceux d’nos bivouacs ! Bref ! Il paraitrait que par les temps qui courent, il n’fait pas bon être un « équidé », nom savant pour dire simplement « cheval », comme le dit l’vétérinaire des hussards.

J’me présente donc à l’ingénieur, commandant le camp, pour prendre les ordres, car mon lieut’nant est en « conférence » comme il dit ! En fait, l’aurait bouffé une friture de champignons trouvés dans l’sous bois. Tant pis pour lui ! Le « Vieux » vient tout juste de donner des instructions au caporal « Trusquin » des ouvriers de marine, qui r’tourne vers ses quartiers. J’salut respectueusement l’ingénieur qui m’regarde de la tête aux pieds : « T’es trop grand pour être un marin !», qui m’dit ! « Un boulet anglais viendra bien t’raccourcir un d’ces jours ! ». « Bin, j’marcherai sur les g’noux Mon Commandant ! » que j’dis, en esquissant un vague sourire sur ce trait d’humour. Y rigolait pas lui ! Bon, J’prends l’papier et je file dare-dare vers l’emplacement d’not bivouac ou il faut monter toutes nos tentes. « Vindiou, si j’avais su, j’serai point v’nu ! ». Derrière un buisson, le lieut’nant et toujours accroupi en faisant des grimaces chinoises. Ah ! La courante, ça n’pardonne pas ! L’aurait du bouffer des fèves pourries et du lard rance, comme nous aut’, y n’serait pas là à gigoter, comme un taret* ! (*Nota : Taret : Sorte de Ver de vase qui bouffe le bois des coques de nos rafiots.)

Après plusieurs heures de dur labeur (Par délégation pour ma part, car j’suis second maître, donc dispensé de ce type de corvée.) J’suis épuisé d’voir mes hommes souffrir par cette horrible chaleur et ça m’donne soif. J’menfile deux bières fraîches tout en gueulant d’sus, car y avancent pas ces gueux d’mat’lots avec le commis aux écritures. « Vous boirez plus tard, bande de moules ! » Que j’leur dit. Et j’leur chante la chanson : « Les caporaux s’en vont boire de la bièreeeeu, et toi pauvre soldat, va boire à la rivièreeeeuuu ! » pour les encourager. Leurs sourires carnassiers et leurs regards en dit long sur ce qu’ils pensent de moi ! J’men moque, j’suis un sous chef !


23h30 : Le lieut’ est devant sa tente, pâle comme un pet d’nonne. S‘appuyant sur une gaffe, il m’tend un papier pour faire l’appel des présents avant qu’les gars s’couchent.

  • 8ème BOMM : 5 présents dont « Mieux-Vaut-Tard », « Requiem », « La Grolle », le caporal « Le Trusquin », et « Le Cadet ». J’compte pas l’commandant ni l’ingénieur Hubert, sont hors rangs.

  • 44ème Equipage de Flottille : Enseigne de vaisseau « La Grenade », quartier-maître « La Garouille », « Sans-Quartier » et les cantinières « La Patience », « Pic-Rose » et puis moi.

  • Enfants de troupes : « La Rafale » et « Kelyah ».

Soit un total de 15 hommes ou presque.



Samedi 4 août :

6h30 : Après avoir montée une garde statique et horizontale dans un champ, tout près du camp, en compagnie d’ma longue vue et son trépied (Nota : Rien à voir avec celle du Lord-Quartier-Maître Lapérouse, plus grande parait-il !), instrument d’ailleurs inutile la nuit, sauf pour regarder les étoiles dont l’Alpha du Centaure, la grande casserole d’ours, la polaire, etc., toutes brillent bin moins qu’not « Lumière Céleste » de chef ! Si avec un tel rapport j’passe pas aspirant, j’bouffe ma matelote. Il semblerait que durant ma garde un combat se serait déroulé sur le camp. C’est l’sergent Tire-Bourre qui, sortant du bois, a failli me marcher dessus et qui m’raconte ça ! J’ai rien entendu d’cette bataille. J’devais être très concentré durant ma garde. D’ailleurs, j’comprends pas, y a des cadavres prussiens près d’moi. Y m’ont eu par surprise, les gueux ! Je m’lève de mon poste de garde, J’suis tout engourdi et j’ai froid. L’sergent m’dit : « Tu t’prendrais pas pour Galilée, mon gars ? » Non de Diou, y va pas bien lui ! « J’connais pas c’type, y doit être dans une tente avec les aut’ gars ! » que j’lui réponds. Y m’regarde, rigole, puis s’en va rejoindre sa batterie.


7h00 : Levée des troupes par le tambour « Le Trusquin » qui bat la Diane. Son « rantanplan » qui m’casse les tympans sert à rien, ils sont tous déjà levés ou presque. J’vois arriver le chariot du forgeron « Buffe-La-Rouille », et les cantinières « Pic-Rose » et « La Douceur ».


8h30 : Réunion des sous-officiers : Préparation des activités de la journée.

Arrivée du détachement du 44ème de Flottille de Bordeaux : « Pleine-Lune, Demi-Lune et Quart-de- Lune, puis celui des OMM : « Main-Gauche », « La Royale » et l’enfant de troupe « Loulou ».


9h00 à 12h00 : Différents ateliers sont mis en place : Escrime au sabre d’abordage, Lancé de couteaux et de grappins.


Les instructeurs sont : L’Enseigne de vaisseau (Très pâle) « La Grenade » et le Sergent Canonnier « Titre-Bourre ». Ont participé aux formations :

  • Escrime : « Le Génois », « Sans-Quartier », « Mieux-Vaut-Tard », « Pleine-Lune » et « Main-Gauche ».

  • Lancé de couteaux : « La Grenade », « Le Génois », « Sans-Quartier », « Mieux-Vaut-Tard », « Pleine-Lune », « Demi-Lune », Quart-de-Lune » et « Main-gauche ».

+ Initiation des mousses (Pas les bières) : « Loulou » et « La Rafale ».

  • Lancer de grappins : « La Grenade », « Le Génois », « Sans-Quartier », « Mieux-Vaut-Tard », « Pleine-Lune », « Demi-Lune », « Quart-de-Lune » et « Main-gauche ».

+ Initiation des mousses : « Loulou » et « La Rafale ». Aucune perte à déplorer !


L’Appointé caporal, aide fourrier « Requiem » ne participe pas aux exercices et travaille dur à l’inventaire des effets et équipements. Bien fait !


12h00 : C’est l’heure de la popote ! Officiers et sous-officiers passent en dernier. Tant mieux !


15h : Rassemblement des matelots et ouvriers sous les couleurs:

Préparation aux techniques de guérilla et d’embuscades dans le bois voisins. Avant d’partir au combat, je m’dis : « Allons-nous finir par en savoir plus sur cette histoire d’chevaux ? » En fait, j’men fout, j’boufferai n’importe quoi, même du singe, pour ne plus ingurgiter le biscuit de terre cuite aux asticots, le lard rance et les fèves pourries.

Départ de deux escouades qui doivent s’affronter dans le bois. A chacune de trouver l’autre et de l’anéantir.

Mon groupe s’enfonce dans l’bois encombré de lianes, ronces et autres végétaux « tropicaux », enfin on fait comme si c’était vrai ! On « chouffe », comme on disait en Egypte, à gauche et à droite et on avance doucement. Hélas ! Vindiou d’merde en flaque, l’aut’ escouade nous piège par un feu nourri. A cause de qui ? D’un d’nos types qui a éternué à faire « défeuillir » tous les arbres de la région ! Nous voila frais et prisonniers.


Deuxième exercice : Nous repartons, mais cette fois, en étant le plus discret possible. L’copain qu’à toussé est pendu haut et court à une branche. Bien camouflé dans les buissons, nous capturons un type de l’équipe adverse, celui-ci, très brave devant la pointe d’une baïonnette sous l’nez, nous informe que son unité s’est divisée en plusieurs détachements dans le but de nous prendre par surprise. L’est tellement bavard qu’il nous donne les noms des navires dans l’port d’Rochefort ainsi qu’leurs capitaines ! « Ta gueule ! ». Que j’lui dis ! « C’est pour de faux not’exercice ! ». Si on s’fait prendre par l’Anglais, faudra l’émondier ou l’assabouire avant d’se rendre.

On décide de continuer l’exploration du bois. Quelques centaines de pas plus loin, dans un buisson adjacent (J’sais pas c’que ça veux dire, mais c’est le lieut’ qu’a dis s’mot !), nous entendons un « pssssssssch » puis un « Nooooooo…BOUM ». On s’rend vite compte que l’Ouvrier 1ère Classe « Mieux-Vaut-Tard » a eu un problème avec son lancé d’grenade. Celle-ci a rebondi sur une branche, il nous a regardé les yeux ahuris et lâcha un « M’enfin, merde alors ! » avant de s’disperser façon puzzle. J’ai ramené sa matelote en souvenir. Cependant, nous finirons par capturer le reste de l’escouade quelques minutes plus tard.


Présents : « La Grenade », « Le Génois », les trois « Lunes », Ex « Mieux-Vaut-Tard », « Sans –Quartier », « Requiem », « Main-Gauche », « Trusquin », « Le Cadet », « La Grolle », « Loulou » et « La Rafale ».


17h00 : Exercice du lancé de grenades mené par l’instructeur sergent Tire-Bourre.


Présents : « La Grenade », « Le Génois », les trois « Lunes », « Mieux-Vaut-Tard » (Ressuscité par Dieu !), « Sans –Quartier », « Requiem », « Main-Gauche », « Trusquin », « Le Cadet », « La Grolle », La Garouille et « Lumière-Céleste » not’ illustre chef !


Ce dernier, voulant nous épater par sa grande expérience des combats rapprochés aux côtés de son « copain » Surcouf, voulu faire une démonstration de haut vol. Il prit une fière position, alluma sa grenade et imitant le geste auguste du semeur, la lança. Hélas vers … l’arrière ! On déplora 12 victimes, toutes mortes en rigolant, comme à Pontivy. L’affaire ne fit aucun bruit en haut lieu et on enterra ces matelots « anonymes » dans le sous bois, comme l’incident d’ailleurs. Maint’nant faut recruter chez les marins ! Sur ce, on décida la fin des activités d’la journée, on n’allait pas en rajouter, faute de combattants.

Le détachement Bordelais quitte le camp. On propose à « Pleine-Lune » de refaire des câlins à Norma, histoire de renouveler l’effectif.

Arrivée du Canonnier « Le Brutal », qui rejoint ses compagnons de l’artillerie de marine.



Dimanche 05 août


7h00 : Réveil et petit déjeuner. Trusquin a r’trouvé son tambour tout crevé « Ah ! les lâches ! Qu’il crie. L’était presque comme un copain, j’pouvais lui taper d’ssus, y disait rien ! ».


9h00 : Début des activités, école du soldat, et entrainement au pistolet pour le combat rapproché. Le premier à passer fut le conscrit « Le Cadet » qui s’essaya au pistolet pour la première fois d’sa courte vie, mais, comme effrayé par les premiers longs feux de l’arme (Clic, clic !), il tendit enfin son arme vers l’avant et tourna sa tête vers l’arrière au moment de tirer. Curieuse façon de viser ! Des mousses jouant plus au loin, virent une branche tomber sur eux, ainsi qu’un oiseau sans sa tête ! « Y faudra persévérer ! » lui dit l’instructeur.

Nouvel exercice d’embuscades dans le bois. C’te fois, tout se déroule presque bien, contrairement à c’que pourrait croire un sergent fou qui m’a pris, tantôt, pour l’matelot Galilée. En fait, alors que nous traquions des canonniers cueilleurs de cèpes (Ce qui n’est pas courant en plein mois d’août !), l’aide-fourrier Requiem qui était en repérage en avant-garde de l’escouade, s’arrêta net, me regarda, me fixa de ses beaux yeux bovins et … éternua bruyamment, comme l’aut’ la vieille. Bien entendu, explosions d’grenades dans nos pattes, Chutes, courses, fuites, lâché d’fusils, cris affolés, pleurs, etc. et des « On s’rend à n’en plus finir, les lâches ! ». Damnés foutus cueilleurs d’champignons, pour en faire quoi d’ailleurs ? Not’ lieut’ et toujours blanc comme un uniforme Autrichien.

Pour terminer cette mémorable journée, nous terminâmes nos exercices par quelques tirs aux canons. Not’ lieutenant fut transformé en chef de tribut africaine pour avoir « boutefeuté » pour la première fois et dame Gigi dite « La Douceur », tous deux furent baptisés selon la tradition des canonniers de marine. Sont fous ces canonniers marins !


12h00 : A la popotte didiou, j’avais une faim de loup ! Pas d’cheval au menu, on a calomnié la Cambuse en l’accusant d’tous les maux d’la terre, le pov’gars !


14h00 : L’ordre est donné d’ramener les couleurs au sifflet de bosco, d’ailleurs le Lieut’ a failli vomir en soufflant d’dans. Mon Diou s’qu’il est pâle c’t’homme là !

Démontage des tentes par les matelots et ouvriers. Il fait horriblement chaud à c’t’heure là d’la journée. J’m’enfile deux bières tièdes en encourageant mes hommes à l’ombre d’un arbre. Le sergent Tire-Bourre sort du bois avec ses chevaux et sifflote comme un bienheureux. Il a toutes ses bêtes. L’aubergiste, dépité, qui a perdu deux des siennes les reluque de près au cas où, puis s’rend voir les déchets et ossements d’la cambuse, on n’sait jamais ! P’tète ben qu’il y retrouvera les restes de « Cambronne » et du « Murat », deux superbes alezans bai brun ! Quitte à s’qu’ils soient transformés en rillettes. L’client verra rien !

Voila l’rapport du détachement de la 5ème compagnie du 44ème de Flottille, Mon Commandant, not’ Lieut’nant tremble trop pour écrire à la plume.




Pour le Lieutenant de vaisseau La Grenade, votre dévoué et très humble Second maître Le Génois, tout près à rendre d’aut’services à vot’ magnanime Grandeur.

Second Maître Timonier Le Génois

 

A l’attention de l’Ingénieur Constructeur

Commandant le détachement du 8ème B.O.M.M/44ème Équipage de Flottille

Journal de marche de l’Ouvrier Charpentier de 1ère Classe « Mieux-Vaut-Tard »

Appointé Caporal à la 1ère Section, 2ème Compagnie du 8ème Bataillon d’Espagne

Mission du 4 et 5 août de l’an 18, Sise le château de Mouillepied, relais des 3 chevaux en Charente Inférieure.

Mon Commandant, vous trouverez ci-dessous l’extrait de mon journal de marche que vous m’avez demandé, puisqu’il semble que j’suis un des seuls lettrés d’la compagnie.

En ce jour du 6 Août de l’an 18

Vendredi 3 août :


16h00 : J’quitte le p’tit dépôt des Ouvriers du port de Nantes, avec un bataillon d’marche de conscrits réfractaires venant de Brest. Direction la Charente inférieure. Les routes sont encombrées de toutes sortes d’équipages du train, de l’artillerie, des camions (Gros chariots de transport), et des guimbardes de fourrage, ainsi qu’des troupes d’infanterie qui semblent tous venir d’la capitale. Les traits tirés et le verbe haut, ces « têtes de veaux » encombrent les routes ce qui ne facilite pas notre marche. Néanmoins, en bon marin (à pied), j’reste fidèle à l’esprit manœuvrier et j’ne perds pas trop de temps à causer avec ces bougres là, trop nombreux à mon goût.


18h00 : Par je n’sais quel miracle, j’atteins le dépôt général de r’monte (de cavalerie) à Saintes, baptisé d’un nom curieux « Hyper U », sans doute une abréviation de « Très grandes Unités ». Il y a un monde fou et des cavaliers partout qui récupèrent toutes sortes de provisions pour l’Espagne. J’y trouve quelques charmantes « galantes » aux épaules plutôt découvertes, mais j’suis là pour remplir mon sac à pain et pas vider ma bourse (Porte monnaies bien sûr !). Pour sûr, je ne mourrai ni d’faim, ni d’soif ce soir ! En sortant du dépôt, J’prends ensuite place dans la carriole d’une cantinière du 2ème Hussards, dont un détachement s’rend à Rochefort. J’reconnais un hussard nommé « l’Étrille », qui m’promait de nous revoir bientôt. A un croisement, j’quitte la colonne et j’file droit vers le Port d’Envaux à 1 ou 2 lieues au moins. Passant près d’une ferme « j’emprunte » un p’tit chariot d’foin et sa mule et j’trotte vers mon lieu de cantonnement.


19h00 : J’arrive devant une bâtisse avec une tour, plutôt cossue, au nom inquiétant de « Mouillepied ». Vache de pays Charentais, il doit y avoir du marais et d’la flotte partout, donc moustiques, palu, dingue, danse de St Guy etc. Je jette immédiatement un coup d’œil au ciel. Hum… Ça d’vrait aller ! J’me dirige vers une grande allée bordée d’arbres dite « Allée cavalière » où s’trouve monté le bivouac des marins. A l’entrée, j’suis accueilli par l’Ouvrier Aide-fourrier « Requiem » (Un Pays) et le matelot « Sans Quartier » (Charentais). Y s’jettent sur moi comme la misère sur le monde. Au contact de leurs pectoraux, j’sens qu’ce sont des costauds, des « couillus » et pas des « femmelettes de tonneaux d’pont », Chose étrange, y n’ont pas d’gros biceps, pas d’poils, ni d’favoris sur le visage, pas d’cicatrice visible et pas d’tatouages guerriers. Ce qui leur donne une drôle d’allure. Bizarre, bizarre !

L’Appointé « Requiem » m’indique ensuite où stationner ma carriole et ma mule. J’décide donc de ne surtout pas y mettre ma monture et je lui trouve un coin plus discret dans l’bois d’à côté, derrière une ferme. J’ai ouïe dire qui s’passe des choses étranges dans nos bivouacs depuis quelques temps. On m’désigne la tente N°5 que j’dois partager avec le caporal tambour « Le Trusquin », un Breton, qui s’trouve être « mon cousin ». L’est pas encore là, alors il est temps d’aller m’présenter au commandant, mon ingénieur en chef.

Ce dernier est en pleine installation et, comme d’habitude, a perdu quelque chose. Je m’interroge un instant sur cette extraordinaire capacité qu’il a de faire disparaître les choses, notamment la solde. Il a une excuse, l’officier quartier-maître-trésorier est absent. Salut réglementaire, droit comme un mât d’misaine. Il m’lance un regard mêlé d’étonnement et d’agacement. J’sens que je ne dois pas traîner dans l’coin sous peine de voir ma soirée disparaître à son tour dans quelque corvée ou garde de nuit. J’file à l’anglaise !


20h00 : J’vais saluer tous les camarades. Je retrouve à une table « Sans Quartier » et « Requiem » ainsi que l’second maître timonier « Le Gênois ». A c’moment là, sort de sa tente un nouveau v’nu, un conscrit dénommé « Le Cadet » aussitôt suivi d’un « roussel » et d’un « mousse » par les compagnons présents. Ha, ha ! Nous sortons nos victuailles respectives. Étrangement, il y a plus à boire qu’à manger mais c’n’est pas grave. Le Commandant nous rejoint avec son coffret d’bois. Not’ Lord-Quartier-Maître Lapérouse (Qui s’est attribué, comme d’autres, la fonction de médecin perso du Cdt) étant absent, j’prends l’initiative de l’remplacer et de vérifier si notre ingénieur a bien pris ses médocs. On n’sait jamais, j’ai d’la place pour des « sardines » sur mon paletot. Il faut l’garder en état, car l’Empereur s’rait bien foutu d’nous en envoyer un autre, plus bourru encore !


21h00 : Les discussions vont bon train et les chopines se vident. Y m’semble qu’à un moment la nuit est tombée subitement, car il fait plus frais. C’qui nous repose d’une chaude journée passée sur les routes. C’est à ce moment que le caporal « Le Trusquin », qui se trouve être « mon cousin », arrive du p’tit dépôt de Vannes. Poignée de main virile et embrassade familiale (je vous ai dit que nous sommes cousins ?). Une bière (Pas fraîche) lui est servie bien entendu, nous sommes civilisés ici !


22h00 : « Le Cadet » dont mon rire sur les vannes de « Cadet - roussel » et « Mousse -cadet » ne lui ont pas plu, s’prend pour un « grand » et m’donne rendez-vous pour un duel à … 23h. Il est fou ! Y va aller dormir pour de bon l’conscrit. Il doit être jaloux de ma barbe rousse qui plaît tant aux dames et rappelle un certain pirate.


23h00 : Je retrouve « Le Cadet » sur le champ d’honneur, pour notre duel. Je lui propose d’enlever son paletot et sa chemise, il serait dommage de les tacher, car c’est pas facile à enlever du sang, même à l‘eau froide, mais bref ! L’honneur d’abord.


23h01 : Duel remporté haut la main en moins d’une minute. Le mioche présomptueux a tenté un truc et s’est ramassé. Ca lui apprendra de s’frotter à plus fort que lui !


23h15 : Dans l’champ d’à côté « Le Gênois » s’agite et sort un étrange objet, sorte de télescope (qu’il appelle ça !) qui permet d’voir de plus près les étoiles. J’me demande bien pourquoi ? Et, baissant mon pantalon, j’lui montre mon derrière en disant « Tu la vois ma lune ? ». On rigole comme des ânes. Ce serait plus efficace avec qu’la longue vue du chef. Après une longue installation nous sommes tous partis dormir, sauf lui qui s’est r’trouvé seul avec son bazar et des « munitions Kro » en disant : « J’monte la garde, la nuit est obscure et sombre, idéale pour une embuscade ! ».



Samedi 4 août


7h00 : Après une bonne nuit d’sommeil sur la paille, je file faire mes ablutions matinales dans l’ruisseau qui passe sous l’château (D’où le nom Mouillepied). J’croise le sergent Tire-Bourre arrivé tôt ce matin. Nous échangeons quelques paroles viriles afin d’montrer not’ joie mutuelle de nous r’trouver. Une fois mes g’noux posés sur les marches servants aux lavandières, j’profite de ce moment privilégié pour me guéer. La tranquillité ne durant jamais bien longtemps, j’suis interrompu par le passage du Commandant et de « Sans Quartier » qui s’en r’tournent au dépôt d’Rochefort où du matériel a été … oublié.


7h30 : Le tambour « Le Trusquin », qui s’trouve être « mon cousin », bat la Diane sans grand effet, tout le monde est déjà levé ! A la fois tambour et caporal, « Le Trusquin » est un homme polyvalent aux talents multiples. Nous allons tous prendre le petit déjeuner (Oignons, pain dur, saucisson et jus d’chaussette).


8h30 : Réunion des sous-officiers : Préparation des activités de la journée.

Arrivée du détachement du 44ème de Flottille de Bordeaux : « Pleine-Lune », « Demi-Lune » et « Quart-De-Lune », puis celui des OMM : « Main Gauche », « La Royale » et l’enfant de troupe « Loulou ».


9h00 : Levée des couleurs. C’est toujours un moment particulier, les années passent mais je ne me lasse pas d’les voir s’élever et virevolter au vent. Bon là, pour le vent, s’était un peu raté mais « La Grolle » s’est chargé d’fournir une bise suffisante pour l’exercice (il aurait d’l’aérophagie , comme il dit!).


9h00 à 12h00 : Différents ateliers sont mis en place : Escrime au sabre d’abordage, lancé de couteaux et de grappins. Les instructeurs sont « La Grenade » et « Titre-Bourre ».

L’Appointé caporal-aide fourrier « Requiem » ne participe pas aux exercices, j’la vois gratter du papier avec qu’sa plume d’oie devant des tas d’effets à contrôler.


12h00 : C’est l’heure du repas ! J’avions bien faim. On r’garde la gamelle de près lors de la distribution. Pas d’ viande de canassons à l’horizon, Ouf ! Nous respirons. J’vérifie du coin d’l’œil que le « Vieux » à bien pris ces médocs. C’est bon ! Il va pouvoir tenir encore une journée.


14h00 : Le repas ingurgité, j’vais nettoyer ma gamelle dans l’eau du ruisseau, quand J’suis attaqué violemment par surprise, non pas par l’ennemi, mais par le matelot « Sans Quartier ». Rev’nu d’ma surprise, j’riposte aussi sec et dans l’choc nous roulons à terre. C’est alors qu’un troisième larron, Un vague commis-aux-écritures, un obscure gratte papier d’l’administration surnommé « Le Glaude » pour ne pas le citer, profite de la situation pour nous vider dessus un baquet d’eau croupie ! Nous voilà bien ou plutôt frais ! Et l’nettoiement d’ma gamelle n’est toujours pas fait. Une fois notre tâche accomplie nous rentrons au bivouac, mouillé comme des poissons sortis d’l’eau. C’est alors que j’aperçois, sur la chemise collante et transparente, la musculation étrange du corps de « Sans Quartier ». Je suis troublé ! Nous croisons l’Commandant qui regardait la scène et lui aussi remarquait les difformités physiques du matelot. J’vois d’la sueur couler d’son bonnet d’police. Il semble troublé aussi.


15h : Rassemblement des matelots et ouvriers sous les couleurs : « La Grenade », « Le Génois », les trois « Lunes », « Mieux Vaut Tard », « Sans Quartier », « Requiem », « Main Gauche », « Le Trusquin », « Le Cadet », « La Grolle », « Loulou », « La Rafale » et « Kalya ».

Préparation aux techniques de guérilla et d’embuscades dans le bois voisin. Départ de deux escouades. A chacune de trouver l’autre et de l’anéantir.

Je me trouve dans l’escouade commandée par le caporal « Trusquin », qui se trouve être « mon cousin ». Avec nous il y a « Demi-Lune », « Quart-de-Lune », « Le Cadet », « La Rafale » et « Kalya ». Avec une équipe de choc pareil, je n’donne pas cher de not’ peau, surtout qu’les drôles n’arrêtent pas de piailler ! Des envies de fratricide montent en nous mais l’honneur et la discipline nous en dissuadent, la corde ou l’peloton aussi.

Un silence pesant règne dans cette forêt équatoriale. L’ambiance est lourde et poisseuse. Nous progressons lentement. A chaque pas la tension monte d’un cran. « La Rafale » et « Kalya » sont sur le point d’mourir et ils ne s’en rendent même pas compte, naïveté d’la jeunesse ! Je vois « Le Cadet » caresser l’chien d’son fusil tout en lançant des coups d’œil mauvais en direction des deux gnomes. Par chance, une intersection et de rapides patrouilles évitent tout geste irréversibles.

Nous repérons l’escouade adverse. Aussi sec, tout en étant dégoulinant d’sueur odorante, je m’colle par terre. Personne ne bouge. La tension est maximale. (Dieu qu’j’écris bien !) Allons-nous être découverts ? Que va faire l’adversaire ? Par chance, celui-ci n’voit rien et se permet même, sûr d’eux qu’ils sont, un éternuement aussi bruyant qu’un coup d’canon dans une sacristie ! Mais ceci est une autre histoire.

Aussi rapide que l’éclair, nous attaquons l’ennemi par son flanc droit et notre salve emporte la moitié d’son effectif. Les aut’ se rendent. La victoire est à nous !

Tout ceci n’étant qu’un exercice, les morts se relèvent et nous rions tous de bon cœur. Les gourdes passent de main en main. La chaleur est accablante ici ! Le Lieutenant fait un point sur l’exercice et décide … d’en refait un deuxième. La composition des escouades changent un peu. Nous troquons les deux infernaux minots contre « La Grolle » et « Loulou ». De plus, nous croisons le sergent « Tire-Bourre » qui glisse dans ma giberne une grenade (non allumée) avec un sourire malicieux.

De nouveau nous nous enfonçons dans le bois. Nous optons pour une manœuvre de contournement. On s’retrouve dans les broussailles et j’dois jouer du sabre (coupe coupe) pour ouvrir le chemin. Nous finissons par tomber sur un sentier. Mais manque de bol, l’ennemi s’trouve tout bout. Dans la confusion notre escouade se retrouve coupée en deux : « Le Trusquin », « La Grolle » et « Loulou », puis « Demi-Lune », « Quart-de-Lune » et moi.

Tout s’emballe, quelques secondes après not’séparation nous entendons périr héroïquement le groupe du « Trusquin ». Des peintures rupestres, des sculptures sur les arbres, des poèmes moyenâgeux et des saltimbanques narreront leurs exploits pour les siècles à venir. Des femmes rêveront d’eux dans leurs rêves interdits. Amen !

Pour l’heure le groupe « Demi-Lune » se retrouve à un carrefour. Le second-maître décide de tendre une nouvelle embuscade. Je ne suis pas convaincu mais les ordres sont les ordres. J’ai fait l’Espagne, le Portugal et l’marché d’Vannes et j’connais bien les techniques des guérillas. A trois contre tout un peloton, c’est la mort assurée. Le second-maître me trouve une position, assez bonne, derrière une grosse souche où les broussailles sont moins présentes. Les « fils de la Lune » filent plus loin. J’suis donc tout seul. Le silence s’installe. L’attente aussi. Un craquement, un bruissement. Tous les bruits de la forêt deviennent suspects. La sueur coule sur mon visage et vient s’accumuler dans ma barbe rousse. J’ai les yeux qui me brûlent un peu. L’attente et la solitude sont insupportables à voir. J’commence à trembler. Et soudain la délivrance. J’entends l’ennemi approcher à pas d’éléphants. Dans ma tête j’chante : « C’est la marche des éléphants, pom , pom, pom … ».

J’agrippe la grenade dans une main, mon biquet à étoupe dans l’autre. Ils approchent. Tout s’emballe ! J’allume la courte mèche pchiiiit et j’la jette à l’arrache. V’la ty pas qu’elle percute une branche avant d’revenir et me péter à la gu… ! Pas l’temps d’dire ouf ! J’meurs donc éparpillé avec pour dernière pensée le rire du sergent ! A moi la gloire éternelle. Mais la gloire éternelle ça vaut pas une bonne ripaille avec des copains ! Quelle guigne… Arrivé là-haut, faut qu’négocie avec St Pierre et disant que s’suis un pote à Dieu, on verra bien !

L’exercice se termine lorsque les « Lunes » tombent à leur tour sous les coups de « Pleine Lune » le père. Tant que ça reste en famille, c’est bon ! Comme on dit par chez nous en Bretagne !

Nota : St Pierre est d’accord pour qu‘je r’vienne parmi les vivants, mais désormais, j’peux tuer l’ennemi, mais sans haine ! D’accord que j’lui dis en crachant dans l’nuage !

Retour au camp pour le rapport à faire au Commandant.


17h00 : Exercice du lancer de grenades par le sergent « Tire-Bourre ». Sont présents : Le lieut’ « La Grenade », « Le Génois », les trois « Lunes », « Mieux-Vaut-Tard (C’est moi !), « Sans Quartier », « Requiem », « Main Gauche », « Le Trusquin », « Le Cadet », « La Grolle », « La Garouille » et … not’ « Lumière Céleste ».

L’chef ingénieur est toujours un peu fébrile avec les grenades. Il préfère ses plumes, ses cartes et ses plans. Voulant nous épater de son « Ancien » savoir-faire traditionnel et ancestrale, il a lancé une grenade qui est parti en arrière et … sur moi ! Deuxième dispersion. J’commence à m’demander si le chef ne m’en veut pas… (Faut qu’je renégocie mon r’tour auprès d’St Pierre avec une bonne bouteille de cognac, car j’vais manquer d’arguments). Plusieurs d’entre nous ont visé « Le Glaude » par inadvertance bien entendu. L’commis coure encore … !

Le détachement Bordelais des « Lunes » quitte le camp.

Arrivée du Canonnier « Le Brutal », qui rejoint ses compagnons d’l’artillerie de marine.


19h00 : Dîner ou plutôt popote : Toujours pas de viande équine au menu. Ouf ! J’vois l’Commandant prendre sa médecine. Pour s’faire pardonner de son exaction du déjeuner, « Sans Quartier » va nettoyer mon auge. C’est ça d’être Ouvrier de 1ère classe et copain d’St Pierre !


20h00 : La soirée est tranquille, puisque toutes les « mousses » ont été bues la veille.



Dimanche 05 août

7h30 : Réveil au son du tambour, ou presque, majestueusement joué sur un bidon, par « Le Trusquin », qui est mon cous… Comment vous l’savez ?!


8h00 : Petit déjeuner et ablutions matinales. Une nouvelle et chaude journée s’annonce.


8h30 : Réunion des sous-officiers : Préparation des activités de la journée.


9h00 : Entraînement au pistolet. Pas très efficace comme arme, on a plus de risques de mourir de vieillesse ou d’ennui que par un tir avec cet engin à la noix !


10h00 : Exercice d’embuscade. Nous revoilà dans ce foutu bois à la chaleur moite. La règle du jeu est un peu différente aujourd’hui. Nous devons trouver et détruire le trio composé du sergent « Tire-Bourre », du canonnier « Le Brutal » et du « Cadet ». Le peloton est commandé par « La Grenade » et est composé de « Requiem », « Sans Quartier », « Le Trusquin », « Le Gênois », « La Grolle », « La Rafale » et moi.

La progression est lente, la chaleur accablante, la concentration à son « paroxysme » (S’sait pas c’que ça veut dire, mais dans l’contexte, c’est un bon mot.). Si les déplacements se font d’un pas léger, la communication entre nous est un peu compliquée. Nous transmettons les indications du Lieutenant par la gestuelle mais nous sifflons doucement pour nous interpeller les uns les autres. Ces sifflements sont entendus par l’ennemi qui peut facilement deviner notre position. Cependant, cela ne nous empêche pas de trouver et détruire nos trois adversaires. Et c’est victorieux que nous rentrons au camp. Nous rendons compte au Commandant et la satisfaction se lit sur tous les visages. La transpiration aussi d’ailleurs.


11h00 : Exercice d’artillerie.

  • Chef de pièce Sergent Tire Bourre

  • 1er servant La Grolle

  • 2ème servant Sans Quartier

  • Chargeur Le Gênois

  • Ecouvillonneur Le Cadet

  • Bout de feu La Grenade / La Douceur

  • Goujat Mieux Vaut Tard

  • Masseuse du goujat Requiem

Afin de ne pas perdre la main, nous effectuons quelques tirs de canon. C’est l’occasion pour le Lieutenant « La Grenade » et la cantonnière « La Douceur » de « boutefeuter » pour la première fois. Naturellement, à l’artillerie ce sont des êtres particulièrement imaginatifs dont leur seule limite est leur perversion, nous dûmes, de manière très réglementaire, leur barbouiller l’museau.


12h00 : C’est l’heure du rata, toujours pas d’morceaux de bourrins. Dieu est avec nous ! D’ailleurs, j’continue d’veiller à ce que notre bon chef prenne ses drogues.


14h00 : L’ordre est donné d’amener les couleurs au sifflet de bosco. S’en suit le démontage du camp par une chaleur qui sonne comme un prélude à la future campagne du Portugal. Je retrouve ma mule sans problème, elle est fraîche et n’a pas dû souffrir de la chaleur, ni d’La Garouille. J’ai peine à dissimuler mon soulagement.


16h00 : L’heure de se quitter est venue. L’émotion et les grincements de dents nous assaillent mais nous restons tous dignes et fiers, mués par la perspective de nos retrouvailles lors d’une prochaine campagne aussi majestueuse que victorieuse au-delà des Pyrénées.


Voilà l’extrait de mon journal de marche concernant le détachement de la 2ème compagnie du 8ème Bataillon d’Ouvriers Militaires de la Marine.

L’Ouvrier de 1ère Classe « Mieux Vaut Tard ». (Aussi humble et serviable, voire plus qu’le second maître « Le Génois » qui lui est servile comme un serpent à sonnette.)

Vive l’Empereur ! Vive Vous ! Oh ! Grand constructeur de vaisseaux, notre guide céleste etc.


Sylvain dit Mieux-Vaut-Tard

 

Et un grand merci à la châtelaine du Château de Mouillepied et de l’Auberge du Cheval chanceux, ainsi qu’à la cambuse et son équipe pour les repas.

 

Retrouvez nous à Almeida (Portugal) du 24 au 26 août 2018, afin de commémorer les soldats (toutes nations confondues) tombés lors du siège de la ville.

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